Paul et Suellen furent les premiers au rendez-vous. A six heure moins quelques minutes, Paul avait catapulté le tacot vibrant de Steve à trois rue d’Alésia, sur un trottoir peu fréquenté. Elle était plantée entre une benne dégoulinant d’ordures et une Lada 2105 taguée, trônant sur quatre parpaings.
Suellen peinait à suivre le rythme de Paul, qui ne faisait plus attention à elle. En s’avançant vers l’église, il faisait le point sur sa propre situation et sur celui qu’il venait de trahir : Oleg. Le violoncelliste l’avait approché quelques années plus tôt et l’avait convaincu de travailler pour lui. Paul n’avait pas eu le choix : Oleg savait que Paul droguait son ami Steve, lors de soirées bien tardives, afin de profiter, à son insu, de sa chair divine. Il le faisait chanter. Le boulot de Paul consista d'abord à surveiller les faits et gestes de Steve, à prendre discrètement quelques clichés et à rédiger un rapport précis, quasiment quotidiennement.
Par hasard, un jour, Paul avait appris qu’Oleg travaillait pour Vladimir, un mafieux ultra violent de Moscou. Le soviet cherchait une fille : Sally, qu’avec Oleg, ils appelaient l’ « héritière ». Ils la trouvèrent.
Oleg apprit alors à Paul que c’était la fille de Suellen et de Vladimir. La mission de Paul fut désormais d’amener Suellen, qu’il connaissait vaguement, à rechercher Sally, et à la reconnaître comme sa fille.
Paul avait alors fait des recherches de son côté. Le véritable prénom de Sue était Selena. Elle était la fille du professeur Nicolaï Sarkösky, directeur de recherche sans gloire à l’Institut de Biologie et de Physique Générale de Sverdlovsk, au début de la guerre froide. Après sa mort prématurée dans un accident, sa femme avait migrée à Paris et Selena, âgée de 2 ans avait pris le nom de Suellen.
Avant ce matin, Paul n’avait jamais envisagé que l’histoire prendrait une telle ampleur et qu’il avait mis son ami dans une belle merde. Steve, son meilleur amis, son amour impossible, était en danger et manipulé. Il était lui aussi, par adoption, l’ « héritier » de Nicolaï Sarkösky.
En marchant vers Alesia, Paul décida définitivement qu'il n’avait plus du tout envie de suivre les ordres d’Oleg, et se demandait comment il allait le payer.
En tournant dans l’étroite ruelle, le petit homme aux cheveux rouges ne vit pas la carcasse de la saxo, qui semblait faire partie de ce paysage urbain dégradé. Mais il fila directement caller son audi en double fille à côté de l’eglise d’Alesia. Traversant la rue, il envoya un texto à John Keller « Pol é sue arivé alésia. Attendon l’éritié ». Brusquement, alors que son cellulaire envoyait le bip de confirmation du message envoyé, il fut percuté par un marchand de frittes ambulant en mobylette, ramassé par deux grosses mains et poussé à l’arrière d’un taxi. Sonné comme un troisième ligne après la charge d’un rugbyman néo-zélandais, mais refusant la défaite, il releva la tête. Une voix s'éleva : J’avais prévenu, on ne s’occupe pas de mes affaires.
8 commentaires:
Vraiment excellent : c'est court, propre, et très instructif... J'adore. On commence à y voir plus clair, pas vrai ? Du beau boulot, guerrier !
Très bon chapitre: les choses avancent, tout semble cohérent...et une petite note d'action pour finir!
Good job!
J'aurai du mettre Nicolaï, prof de phy... Mais c'était plus galère pour l'intrigue. Quel héritage peut bien laisser un prof de phy.
D'autant que l'expression consacrée est "Prof de Phys' "... Mais pour répondre à ta question, je dirais que question pognon, pas grand chose. Mais au niveau de la maitrise de la PS2, il y a quelque chose...
Génial !
A part que la saxo en prend encore pour son grade... et ouf, Nicolaï n'est pas prof de Phys', moi j'aime autant !
En tous cas Guerrier, t'as même pas besoin de signer : la photo retouchée ne peut être que ton oeuvre !
Oui, c'est vrai, elle est vraiment bien reussie... Ce vieux savant fou me rappelle vaguement quelqu'un, et etrangement, il me fait froid dans le dos...
Et Tranchard il en pense quoi? Fan de la physique du far breton?
Excellente photo au demeurant.
Tranchard, il va te mettre des pruneaux dans l'C... au lieu de les mettre dans son far.
A bientôt Samouraï
Tranchard le subtil
Enregistrer un commentaire